mardi 10 juillet 2007

Le vierge âge jeune

Matzneff ne contracte de plaisir qu'en procédant à un retour dans le temps, avec des partenaires jeunes (lycéennes) ou extrêmement jeunes (garçons ou filles d'une dizaine d'années à peine). Cette manière de localiser l'Age d'Or suppose déjà un fort besoin d'adhérer à cet Age d'Or. Il existe bien, je l'ai rencontré. Le pédophile (à des degrés divers) n'est jamais qu'un négateur de temps. Comme si le temps ne s'écoulait plus avec ces relations nombreuses et comme si le pédophile accédait à l'extrême jeunesse en satisfaisant à ce besoin de relations. Là n'est pas l'essentiel : ce qui me frappe le plus, c'est l'obsession de la virginité. La virginité sexuelle renvoie au fondement introuvable. La vierge exprime la pureté de ce qui n'a pas été souillé. Accéder au réel pur, c'est passer du sensible à l'idéal, conférer à la sexualité, non plus une dimension de chute et de péché, mais d'élévation et de transcendance. Voilà pourquoi Matzneff se trouve contraint de répéter à l'infini son geste de pédophile, avec l'illusion à chaque fois d'approcher de la virginité ontologique et de l'élévation spirituelle. Par définition, la quête de Matzneff est illusoire : la sexualité vous installe dans le réel et le sensible, plus qu'elle ne vous en sort. La répétition indéfinie du même suffit à prouver le caractère utopique du même. Matzneff ne peut que répéter dans la mesure où il passe à côté. Son geste compulsif est celui d'un échec qui voudrait passer pour une victoire. C'est en quoi la perversion de Matzneff se différencie aussi de la pédophilie violente et homicide qu'il stigmatise. C'est pour vouloir retourner intellectuellement le sens que Matzneff en vient à légitimer le monstrueux, sans qu'aucune pulsion insurmontable ne le pousse à accomplir son crime pathologique. En retournant le sens, Matzneff escompte fonder l'idéal. Il ne fait qu'aviver son spleen.

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