vendredi 29 juin 2007
La perversion de la foi
Dans son altercation avec Lumbroso, Polac ne dispense pas seulement des explications fumeuses et fumistes. Avant de suinter de morgue et d'arrogance, qualités dignes d'un bon gaucho, Polac fait surtout preuve d'une mauvaise foi assez inquiétante. C'est ainsi qu'il explique le scandale causé par la publication, dans son Journal de 2000, d'un épisode pédophile par la bêtise moralisatrice. Pas compréhensive ni permissive? Lumbroso serait une "nunuche". Mieux vaut être nunuche que détraqué sexuel! A en croire Polac, l'accuser de pédophilie relèverait de la mauvaise foi (mécanisme de la projection bien connu, qui consiste à prêter à ses détracteurs les qualités dont on se trouve tristement affublé), car il n'a eu qu'une relation sexuelle avec un enfant de onze ans, léger handicapé mental et orphelin. Personne n'a prétendu que Polac était le Matzneff du journalisme, c'est-à-dire un pédophile chronique et heureux de l'être. Je suis même persuadé que la confession de Polac procède d'un remord qui refuse d'avouer son nom. Il n'empêche que se focaliser sur les désagréments engendrés par sa pratique pédophile procède d'un retournement d'importance ignominieux : manière d'inverser l'ordre des choses pour rendre le secondaire primordial et l'essentiel accessoire. Ainsi le principal reproche que Polac adressera à Lumbroso sera, à la suite de l'émission où elle l'a questionné sur cette confession, de lui avoir occasionné une nuit d'insomnie! La différence des pratiques pédophiles, bien que certaine, n'autorise pas le refus de la réalité. Et quel refus! Violent et irréaliste! Et c'est Polac qui remet sur le tapis le sujet brûlant! C'est donc que l'impudence s'accompagne ici d'une certaine dose d'inconscience, voire de bonne foi. Il est d'ailleurs curieux, je le répète, que personne ne soit intervenu pour quitter le plateau et ne pas compromettre sa présence dans cette farce abjecte. Que dirait-on d'un violeur qui affirmerait : "Je n'ai violé qu'une fois, donc je ne suis pas violeur"; ou : "J'ai violé une fois. L'expérience ne m'a pas plu, je n'ai pas récidivé." Un violeur est un violeur à partir du moment où il viole. Idem pour le pédophile. S'il est certainement des différences de pédophilie, même la plus singulière et exceptionnelle des pédophilies ressortit de la pédophilie. La monstruosité est remarquable en ce qu'elle se réclame de la normalité et s'insurge contre les reproches les plus fondés. Avec Polac, les critiques les plus légitimes auront toujours tort. Il sera scandaleux de s'insurger contre le fait de se branler, puis d'éjaculer sur les fesses d'un gosse fragilisé! Ce sera bêtise que de s'être livré au scandale médiatique pour une confession si sincère et vénielle ! Lumbroso aura tort d'avoir posé des questions si indiscrètes! Polac passera pour l'agressé en proie à l'injustice! Magie noire que celle du pédophile. Allons plus loin : magie noire que le raisonnement typiquement pervers. Il consiste à transformer en liberté et noblesse de sentiments les actions les plus sombres et destructrices auxquelles l'homme se livre. Le raisonnement est chez Polac de si bonne facture qu'il autorise à expliquer que la pédophilie n'est pas de la pédophilie et que le réel n'est pas le réel. A ce niveau de dissimulation, Polac est un grand alchimiste : il n'aura pas écrit ce qu'il a écrit et il n'aura pas fait ce qu'il a fait. L'or n'est pas du plomb : c'est de l'or! La foi est d'ordinaire cette force et ce secours qui permettent de vivre et de transcender, y compris les moments les plus difficiles. La foi déplacerait des montagnes. Il arrive parfois qu'elle convoque des abîmes et des abysses.
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