mercredi 9 mai 2007

Ce soir ou jamais?

Episode 4.

En commençant son émission culturelle, où l'esprit critique semble avoir été remplacé par celui du marché, sur le thème de la pornographie, Taddeï annonce la couleur : loin de juger, il préjugera, en reprenant les poncifs de la soi-disant libération des moeurs. Par les temps qui courent, plus conformiste, tu meurs.
Il présente Katsuni, l'actrice porno aux deux cents films en six ans de tournages harassants (quelle artiste incomparable!), comme l'antithèse des stéréotypes qui courent d'ordinaire sur les origines sociales des actrices porno. Katsuni n'est pas issue du prolétariat. Elle n'a pas choisi la pornographie pour fuir l'usine. Katsuni est une brillante jeune femme, issue de la bourgeoisie, qui avait le choix entre des études de sciences politiques à Grenoble et la pornographie, et qui a choisi la pornographie. Taddeï se rend-il compte qu'il reprend le poncif majeur de l'illusion, qui consiste à dissocier liberté et oppression au nom du libre choix consenti?
On pourrait commencer par ergoter sur la conception du choix : a-t-on vraiment le choix de choisir quoi que ce soit? Question capitale, mais passons. Je n'ai mené aucune enquête sur la véracité des affirmations autobiographiques de Katsuni. J'ai pourtant quelques suspicions depuis que je suis confronté à la distinction fantasmatique entre prostitution libre et forcée, entre cerfs-prostitués et self-travailleurs du sexe. Les actrices porno disent-elles la vérité comme les personnes prostituées? Autre grave question, qui a le tort de biaiser le débat. Là encore passons.
Je doute qu'après ces deux manœuvres d'occultation, le débat ait encore quelque pertinence. Pourtant, si je m'y attache encore, c'est que Taddeï croit bon d'opposer le libre choix de Katsuni au moralisme de la repentance d'inspiration chrétienne. C'est tout le problème de ce genre d'animateurs, ami d'Ardisson et de Nabe (pourtant chrétiens peu suspects d'orthodoxie, quoique), qui se croient d'autant plus libres et pertinents qu'ils cooptent toutes les transgressions outrancières de l'époque : créer des clivages caricaturaux et stupides. La liberté s'opposerait à la morale; la morale serait nécessairement liberticide et étriquée; la religion découlerait de la superstition et du crétinisme.
Katsuni s'empresse d'acquiescer. Elle au moins n'est pas prête de sombrer dans les miasmes de la culpabilité! Elle au moins n'imitera ces pitoyables actrices, qui, une fois la retraite venue, regrettent leurs écarts (de jambe et de conduite) et déballent les sordides anicroches des coulisses du sexe cinématographié! Elle au moins a commencé par envie et continue(ra) par envie! Katsuni est heureuse dans ce qu'elle fait et essaie de le partager au mieux. L'affaire est entendue, il est plaisant et raffiné de se faire sodomiser à longueur de temps par deux bites surexcitées en léchant frénétiquement celle d'un troisième excité!
Si l'on en croit la vulgate matérialiste et ultralibérale que vulgarise Taddeï, comme tout bon contemporain qui se respecte, surtout quand il passe à la télévision, Katsuni est l'icône de l'époque, puisqu'elle s'oppose au moralisme des temps obscurs et passés. Autrement dit : la pornographie incarne la libération des moeurs. CQFD?

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