lundi 11 juin 2007

Colonialiste et fier de l'être!

L'opposition de l'islamisme radical et de l'ultralibéralisme (démocratie, capitalisme, liberté, prospérité, bonheur matériel...) ressemble à s'y méprendre à la fable relatant le face à face des frères ennemis, dont l'opposition n'est jamais que le point commun irréconciliable : l'envers de l'endroit. Qu'il le veuille ou non, le système occidental est le grand frère protecteur et manipulateur qui dénonce la juste monstruosité de l'islamisme (son vice de fond), après l'avoir attisé et dirigé contre son ennemi de l'époque, le défunt communisme, qu'on finira presque par regretter. Le communisme avait l'insigne mérite de préserver l'humanité de l'uniformité. Avec la bipolarisation, l'homme tenait son intérieur et son extérieur (relatifs). L'effondrement du communisme n'a guère profité à l'ultralibéralisme rampant. Ses bailleurs (à moins qu'on n'impute l'impersonnelle mentalité de l'époque) ont vite saisi que l'homme avait besoin d'un intérieur et d'un extérieur pour que son système de représentation n'accuse pas un affolement confinant dangereusement à la perte de repères. Anéantis à l'idée de perdre leur poule aux oeufs d'or, ils n'ont rien trouvé de mieux que de créer de toutes pièces un ennemi artificiel pour compenser l'évanouissement irréparable de l'ennemi effectif. Il fallait un tigre de papier - et les prédateurs fictifs ne se trouvent qu'au royaume des déshérités. Le plus ingénieux revenait encore à chasser le précieux animal chez les plus colonisés des néo-colonisés. C'était un jeu d'enfants : il suffisait de s'emparer de la doctrine ultraréactionnaire qui sévissait dans les pays de l'or noir, où les dignitaires acceptaient mal de servir l'hyperpuissance étrangère alors qu'ils avaient les ressources naturelles et culturelles pour détrôner cette hégémonie humiliante. L'islamisme n'est jamais que la réaction au néocolonialisme occidental, encouragé par le néocolonialisme pour mener ses oeuvres de diversion. En tant que tel, cet extérieur n'est jamais que l'extériorisation de la face sombre de l'intérieur. L'extérieur comme partie de l'intérieur et autopromotion du même au rang de l'autre, il fallait y penser! Toute l'hypocrisie tient dans cette entreprise de dissimulation et d'apparence trompeuse, dont le but est de cacher l'horrible vérité : sans extériorité, l'uniformité aboutit à la destruction. Le désir a besoin d'un but pour se réaliser de manière constructive. Privé de ce but, l'homme ne fait pas qu'errer. Il retourne son énergie et ses forces contre lui-même, dans un geste qui n'est pas sans évoquer les animaux enfermés dans des cages de zoo. Peut-être moins que le désespoir suicidaire, c'est à un réflexe fort logique qu'il faut imputer cet acte incompréhensible. La logique du désir étant de conquérir et de détruire, l'homme privé de buts se détruit lui-même. L'islamisme n'est terrifiant que dans l'exacte mesure où il révèle l'impasse dans laquelle s'est engagée la modernité, en clamant avec désinvolture et ostentation qu'elle avait trouvé la voie bénie vers le Progrès et le Bonheur. Foutaises! L'homme est condamné à reprendre sa marche vers l'effort et l'extériorité en se fixant le seul but qui soit en mesure de lui garantir une extériorité viable : l'espace, seul lieu qu'on puisse encore conquérir sans se faire taxer d'horrible colonialiste. Les bonnes habitudes ont la vie dure...

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